Publié le 28 févr. 2023 à 19:18Mis à jour le 28 févr. 2023 à 19:22
« On réfléchit, on apprend et on s’adapte. C’est l’essence d’une bonne gestion du risque ». David Solomon a joué une partition difficile, mardi lors de la deuxième « journée investisseurs » dans l’histoire de Goldman Sachs. Après des résultats en berne au dernier trimestre et une diversification coûteuse dans la banque de détail, les marchés financiers attendaient le banquier de pied ferme pour « reprendre le contrôle du récit stratégique » de l’entreprise, comme le soulignaient en amont de la présentation les analystes de Bank of America.
Dans l’auditorium du siège de la banque, au 200 West Street à New York, David Solomon n’a pas esquivé l’éléphant dans la pièce, en évoquant la possibilité de suivre des « alternatives stratégiques » pour certaines de ses activités dans la banque de détail. Elle a perdu plusieurs milliards de dollars depuis son lancement – de la banque en ligne Marcus aux partenariats dans les cartes de crédit avec Apple et General Motors en passant par le rachat de la fintech de paiement GreenSky.
Après avoir annoncé en octobre renoncer à recruter de nouveaux clients pour Marcus, désormais dilué dans la gestion d’actifs, Goldman Sachs va désormais se concentrer sur la réduction des pertes dans sa nouvelle division des « solutions de plateforme », qui regroupe notamment les cartes de crédit et GreenSky. Toutes les « options » possibles seront examinées d’ici 2025, lorsque la division est censée devenir profitable.
Foyer de pertes
Les investisseurs sont néanmoins restés sur leur faim – le cours du titre cédait jusqu’à 2,7 % en séance. « On vous a expliqué très clairement qu’on veut être à l’équilibre avant impôt en 2025 », s’est finalement agacé David Solomon, interpellé par des analystes se demandant pourquoi la banque ne coupait pas plus franchement son foyer de pertes, dans un environnement en outre assombri par la hausse des taux d’intérêt et le ralentissement de l’économie.
Non seulement l’aventure dans la banque de détail a déjà coûté cher à Goldman Sachs, mais elle a laissé les concurrents prendre de l’avance – en particulier Morgan Stanley . La reconquête des investisseurs passe désormais par un retour aux fondamentaux, illustré par la réorganisation annoncée en octobre, avec le regroupement des activités de marché et de conseil d’un côté, et de la gestion de fortune et d’actifs d’un autre – l’activité sur laquelle la banque espère le plus capitaliser.
John Waldron, qui a le rare double titre de président et de directeur des opérations (COO), a résumé les forces de la banque : « un conseiller de confiance, un état d’esprit centré sur le client, et une plateforme mondiale et profonde ». Il a réaffirmé les objectifs définis il y a trois ans. S’ils ont déjà été atteints en moyenne sur ces trois dernières années, ils ont été gonflés par une année 2021 atypique.
Pour atteindre un rendement sur fonds propres entre 14 et 16 %, l’objectif est désormais de gagner 10 milliards de dollars de commissions (contre 8,8 milliards de dollars l’an dernier), et de réduire l’intensité capitalistique des opérations, en libérant 9 milliards de dollars de capital.
Le leader mondial du conseil en fusions et acquisitions a aussi promis de plus amples efforts pour maîtriser ses dépenses, avec l’objectif de les réduire d’un milliard de dollars en année pleine. Après avoir fait bondir les effectifs de plus de 25 % pendant la pandémie, Goldman Sachs a déjà annoncé le licenciement de 3.200 salariés , soit 6,6 % des effectifs.
Rachat d’actions
Pour séduire les investisseurs, le directeur financier de la banque, Denis Coleman, a fait miroiter plus de dividendes et de rachats d’actions. La banque a déjà racheté pour 2,25 milliards de ses actions au premier trimestre, et autorisé une enveloppe de rachat de titres de 30 milliards de dollars.
David Solomon a aussi du travail à faire pour convaincre en interne. Si elle continue à attirer les jeunes banquiers, la banque peine à se défaire de son image de « boys club » et d’une culture du travail forcené. « Je déteste le bruit, j’aimerais qu’il soit différent », a-t-il consenti.