
Le sujet est remonté sur le haut de la pile aussi vite que les taux d’intérêt appliqués par les banques centrales. Il est même devenu incontournable, après la chute de Silicon Valley Bank puis de Credit Suisse.
Les banques de la zone euro affichent d’excellents ratios de solidité, mais doivent « consacrer davantage d’attention aux risques de liquidité et de financement », sous peine d’être « prises au dépourvu » par les nouvelles conditions de financement, a martelé mardi Andrea Enria, le gendarme en chef des banques de la zone euro.
En raison de la hausse des taux enclenchée l’an dernier, les ressources des banques sont devenues plus chères, et moins stables. Les plans de financement des banques et la diversification des sources de financement figurent d’ailleurs déjà au rang des priorités de supervision affichées par la Banque centrale européenne (BCE), qui assure la surveillance bancaire de la zone euro.
Ces avertissements ont toutefois pris un poids particulier, dix jours après le « bank run » qui a mis à terre Silicon Valley Bank en moins d’une semaine, puis des graves difficultés connues par Credit Suisse. Les deux situations sont très différentes , mais avec pour point commun que les banques ont à un moment perdu la confiance de leurs déposants ou de leurs investisseurs, avec pour perspective une évaporation de leur financement.
Rien de tel pour l’heure au sein de la zone euro, assurent depuis plusieurs jours la banque centrale comme les autorités nationales de l’Union. « La position en capital et en liquidité des banques demeure solide, bien au-dessus des minima réglementaires », a encore souligné Andrea Enria, qui s’exprimait devant le Parlement européen.
Questions sur les « AT1 »
Un instrument de financement toutefois a plus particulièrement ému les députés : les dettes bancaires subordonnées (dites « AT1 » ou « Additional Tier One »). Ces titres de dette servent à conforter les capitaux de la banque.
Les autorités suisses ont décidé – dans le cadre de la reprise express de Credit Suisse par UBS – de maltraiter les investisseurs qui avaient souscrit ce type de dette, alors que les actionnaires, sans être épargnés, vont tout de même récupérer 3 milliards de francs suisses (l’équivalent en euros) payés par UBS. A la clé, une perte sèche de 16 milliards de francs suisses pour les détenteurs d’AT1… et de sérieux doutes sur le respect de la hiérarchie traditionnelle. Celle-ci prévoit qu’en cas de crise, l’actionnaire perde sa mise avant les détenteurs de dette.
« Pouvez-vous nous certifier qu’il n’existe pas dans la zone euro des clauses comparables à la Suisse ? », a interrogé l’un des parlementaires, plusieurs autres questions portant aussi sur ce sujet. Un tel montage « ne serait pas faisable » en Europe, car « il n’existe pas de clause semblable », a insisté Andrea Enria. Au-delà des règles de droit, il existe « un engagement politique à respecter la hiérarchie des créanciers », a ajouté le superviseur.
Le traitement appliqué aux AT1 de Credit Suisse a semé le doute sur l’ensemble de cette source de financement stratégique pour les banques, amenant ces derniers jours tant la BCE que la Banque d’Angleterre à prendre publiquement leurs distances avec la décision prise par la Suisse.